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Reflets du Cosmos dans l'encrier...

Réflexions, pensées, contes, nouvelles et romans...

Qui est Elisheba Derpal ?

Qui est Elisheba Derpal ?

Parler de ses personnages, pour un auteur, est un exercice à la fois simple et compliqué…

 

Le plus simple, c’est d’expliquer ses actes, détailler sa psychologie, raconter la raison pour laquelle l’auteur a tiré les fils de sa marionnette d’encre et de papier dans une certaine direction pour lui faire tenir tel ou tel discours, prendre telle ou telle décision, bref, tout ce qui fait que le héros, ou l’héroïne, est ce qu’il est.

 

Je me souviens d’un épisode de «La quatrième dimension» intitulé «Un monde à soi», dans lequel un auteur se livrait à une minutieuse description de ses personnages en enregistrant le son de sa voix sur une bande magnétique. Miraculeusement, ceux-ci surgissaient du néant et entraient dans sa vie. Dans cette histoire, il partageait l’existence d’une femme assez rigide, qui lui reprochait une liaison supposée avec une jeune femme blonde qu’elle avait aperçue dans son bureau, mais qu’elle n’avait jamais pu surprendre en flagrant délit, comme si elle s’évanouissait dans les airs dès qu’elle pénétrait dans la pièce.

En fait, la jeune femme blonde était l’héroïne du futur roman à paraître de l’écrivain doué de cet étrange pouvoir, et les grandes scènes que lui faisait son épouse le convainquirent soudain qu’il avait fait le tour de la question dans son ménage, surtout quand elle commença à envisager de le faire interner à cause de ses explications alambiquées. Elle n’aurait jamais dû le menacer de la sorte, puisque le téléspectateur découvrait, à la fin de l’histoire, que l’épouse de l’écrivain elle-même était issue de son imagination, mais qu’elle l’avait sans doute oublié : il s’en débarrassa sans scrupule en jetant au feu le bout de bande magnétique qui contenait sa description. En un instant, il put avantageusement la remplacer par la jeune femme blonde et douce dont il avait peu à peu peaufiné le portrait.

 

Cet exemple-là nous montre ce qu’il arrive quand un personnage de fiction s’incarne soudain réellement. Mis à part dans un épisode d’une série de science-fiction, personne n’a jamais vu cela… Ce qui est bien plus compliqué, c’est lorsque l’aspect physique (et un peu le mental…) d’un personnage vous est inspiré par quelqu’un de réel. Allez, pour une fois, je me suis mise au défi de partager avec vous la genèse d’un personnage, puisé parmi ceux qui n’ont pas encore d’existence concrète puisque le livre n’est pas à ce jour publié.

 

Dans les lignes qui suivent, vous pourrez découvrir la jeune Elisheba Derpal, mise en scène dans un extrait de mon prochain roman, qui n’a toujours pas de titre...

 

«Soudain, une forme se dessina sur l’écran du poste de travail d’Elisheba, et elle ne put réprimer un petit cri enthousiaste qui attira l’attention de Wilfried. Il abandonna aussitôt l’étude des trajectoires d’approche qu’Erin Lindgren lui avait commandée et se glissa derrière la jeune femme pour mieux voir son écran.

- Tu tiens quelque chose, constata-t-il d’un ton égal.

Elisheba leva un sourcil, puis plissa les yeux, affinant délicatement ses réglages jusqu’à ce que les vagues images qui prenaient peu à peu corps sur ses écrans commencent à ressembler à des silhouettes humaines. Encore quelques degrés de rotation et d’inclinaison des antennes et la neige et les moirures qui troublaient l’écran disparurent, puis, quelques instants plus tard, des sons cohérents se synchronisèrent avec les images soudain aussi nettes que celles d’un show télévisé Terrien.

- Bingo ! lança Elisheba. On est encore loin, mais ça capte !

- Bravo, ma belle ! s’exclama Wilfried en posant ses mains sur les épaules de la jeune femme. Tu les tiens… Surtout, reste bien sur cette bande de fréquence-là !

Elisheba sourit. Elle verrouilla la position des capteurs puis, croisant les bras, glissa ses mains sur celle de Wilfried pour resserrer ses doigts sur les poignets de l’androïde. Elle pencha la tête en arrière et sourit encore plus largement en croisant le regard paisible du robot qui la considérait avec attention. La texture de l’enveloppe artificielle de Wilfried la troublait : ses concepteurs avaient poussé le sens du détail jusqu’à la tempérer à la perfection. Non seulement sa peau était aussi douce que celle d’un véritable humain, mais elle était tiède et souple sous la pression de ses doigts.

- À quoi joues-tu, Wilfried ? interrogea Elisheba en le sentant glisser doucement ses pouces le long de ses vertèbres.

- Je ne joue pas, répondit l’androïde. Mon tricordeur m’indique que les muscles de ton dos et de tes épaules sont noués. Tu as dû trop te crisper pendant tes réglages. Laisse-moi décoincer tout cela.

Elisheba leva de nouveau les yeux vers lui. Wilfried considéra son visage au teint mat avec attention, soudain vaguement dubitatif. Il avait été programmé pour interpréter les expressions faciales humaines, mais avait un mal fou à comprendre ce que pouvait bien signifier son demi-sourire. Il se fit automatiquement une réflexion muette sur la symétrie de ses traits : les critères habituellement pris en compte pour juger de la beauté humaine qui lui avaient été inculqués lors de sa programmation lui faisaient classer le faciès d’Elisheba parmi les plus agréables à observer. Elle avait de beaux yeux noirs, les sourcils bien dessinés, un nez droit et sans défaut, et deux petites fossettes encadraient son sourire sur ses joues juvéniles. Sa silhouette lui semblait équilibrée, et si elle se plaignait parfois de n’être pas très grande, il considérait que cette donnée n’entrait pas en ligne de compte pour quantifier sa beauté, d’autant plus que l’ensemble de sa personne dégageait une impression harmonieuse.

- Si tu étais humain, je penserais que ta technique de drague est un peu lourde, fit Elisheba dans un rire léger.»

 

Elisheba existe vraiment, mais elle se prénomme Lysa. Elle sait qu’elle prête ses traits à cette jeune femme, et je la soupçonne même d’en tirer un peu de fierté…

 

Mais ce qui est le plus troublant, c’est d’avoir découvert, bien après avoir intégré Elisheba dans cette histoire, que la mère de Lysa, pour lui exprimer son amour maternel, l’appelle «Sheba». Je ne le savais pas avant d’avoir écrit ces lignes, et c’est là que se pose la question de savoir quel étrange fil relie l’auteur, le personnage imaginé et la personne qui l’a inspiré.

 

Il faudra patienter un peu avant d’en savoir plus sur Elisheba Derpal, mais je peux vous dire qu’elle est maligne, futée, curieuse, un vrai petit génie de la technique, et qu’il lui arrive de faire des bêtises !

 

Il y a bien d’autres personnages qui ont pour moi un visage familier. Peut-être, au fil du temps, en découvrirez-vous de nouveaux ici.

 

En attendant, puisque c’est aujourd’hui son anniversaire, ce texte est un petit cadeau personnel pour Lysa, et la bande sonore qui l'accompagne, une dédicace spéciale en ce grand jour ! 

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J
"Mon Dieu est ma subsistance" quelle belle signification en hébreu "d'Helisheba"....Belle mise en lumière pour annoncer un nouveau roman. Le mystère reste entier, ce personnage n'est-il pas le reflet de l'auteur qui par sa plume se devoile un peu plus !!!...Jean Claude
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